« …
Je ne sais par où commencer !
Pour les
médicaments, les prescriptions sont faites sur un bout de papier et la
famille va chercher les médocs à l’hôpital.
Dans la salle
de soins de la maternité, il n’y a rien, juste un savon pour se
laver les mains, pas de matériel, des sets de pansements stériles, une
toute petite réserve d’eau distillée, sérum en cas
d’extrême urgence. Pour se préparer à accoucher, la famille
installe la future mère dans la salle d’accouchement, avec leurs
lambas (tissus de la famille) directement sur la table en inox pour la
sortie du bébé. Il est mis dans les lambas et on coupe le cordon avec
une boîte de matériel inox. Une fois l’accouchement fait, on
s’occupe du BB, on le nettoie et on le met dans ses habits.
S’il faut le ranimer, on met le lamba sur le visage de
l’enfant, et on souffle dans la bouche du bébé. Cela nettoie les
narines et si le bébé ne pleure pas tout de suite, la sage femme lui
donne de grands coups dans le dos pour le stimuler. Je suis sûre, vu la
maman que cet enfant ne va pas être plus psychopathe qu’un
autre ! C’est moi qui ai sorti la tête, puis l’épaule
et la deuxième épaule et tout le reste a suivi. Merveilleux moment
magique dans le respect de la vie et de la nature. La
maman avait un visage radieux…
Mais si les
malades n’ont pas d’argent, pas de soins. C’est
terrible. »
« Très
vite le nombre de malades commençait à augmenter, sûrement parce que
les villageois prenaient conscience petit à petit qu’une
« dokotera » vazaha était au village de Mangily. Je tiens à
préciser que pour eux nous sommes « docteur », mais moi je ne
me suis jamais prise pour tel, je suis infirmière… »
« Mes
collègues malagasy travaillent bien, savent pendre les initiatives
qu’il faut. Hanitra a des doigts de fée pour accoucher les
femmes, Claire accueille les malades avec son sourire à la Rihanna,
Dayame apprend aux femmes à s’alimenter correctement et Elisée
les soigne bien. Elles sont toutes à l’écoute du malade, de leur
malade, et les suivent de près. Je suis fière d’elles… »
« Les
villageois savent que le travail est de qualité, et ils viennent par
charrettes entières de malades…. »
« Le
dispensaire a maintenant son puits, et cela n’est pas
négligeable. Il fallait voir les filles aller chercher de l’eau
sur la tête presque tous les jours. Malgré avoir vécu un an là-bas avec
elles, je n’ai jamais réussi à ce que le seau
tienne…. »
« De
retour en France, je suis maintenant mélancolique de cette vie.
J’ai appris beaucoup de choses sur moi-même ; vivre seule
pendant presque un an, ça laisse du temps pour réfléchir. Egalement sur
ma vie en France, je sais à présent ce que je veux, ce que je ne veux
pas, surtout ce que je ne veux pas. J’ai vu ce que je voulais
voir : un autre peuple qui vit sans tout ça, cette abondance de
marchandises. J’ai vécu sans beaucoup de choses, de
l’essentiel, et on peut vivre avec moins… »
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« Je
devais me rendre rapidement à l’évidence que l’étranger
c’était moi finalement, échappé d’un autre ailleurs,
d’un autre temps, une espèce d’extra-terrestre en somme,
avec ses principes bizarres de toujours vouloir aller plus vite, de
parler plus fort que les anciens, de ne pas craindre les pouvoirs
magiques, même si j’ai appris à les respecter par la
suite… »
« J’ai
eu l’impression que beaucoup de gens en Europe vivent dans
l’illusion la plus totale concernant leur vision de la vie en
société… »
« L’important
dans notre jugement européen est de ne pas laisser de place à l’indifférence… »
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